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pays-bas français, société

À Wervik, le tabac passionne

23 août 2024 4 min. temps de lecture

Dans la ville
frontalière de Wervik se cache une institution qui mérite d’être découverte. Le
Nationaal Tabaksmuseum, ou Musée national du Tabac, revient sur
l’aventure du tabac en Belgique et en Europe. Une immersion historique et
sociologique pour ce nouvel épisode de notre série Passage.

«Quand les gens entrent, je leur demande souvent pourquoi ils sont venus. Après leur réponse, je leur résume ainsi ce qu’ils vont voir: “visiter ce musée, c’est faire un chemin dans l’histoire, car on remonte l’histoire à travers l’usage du tabac. C’est aussi faire beaucoup de sociologie, puisqu’on explore ainsi les coutumes des gens à travers les époques”».

Anny Beauprez, guide, résume à merveille l’impression que l’on ressent après une visite au Musée national du Tabac, situé dans et autour d’un ancien moulin du XVIIIe siècle en bord de Lys. Car si on peut y entrer quelque peu dubitatif sur ce que l’on va y apprendre, on en ressort avec un regard bien plus aiguisé sur la culture du tabac, sa transformation, sa vente, sa contrebande, ses relations avec la musique, avec la publicité… Et aussi le pourquoi de ses usages bien sûr. Saviez-vous que s’il y avait du tabac à chiquer, c’était avant tout pour les professions qui ne pouvaient pas fumer, ainsi les mineurs et les marins?

12 000 objets et des surprises

L’aventure de ce musée niché à la frontière franco-belge a démarré dans les années 1980. Des représentants de diverses associations de Wervik se sont regroupés pour collecter des objets autour de la culture du tabac. Pourquoi ici? La commune était un important centre de culture du tabac au XXe siècle avec le «toebak de Wervikschen». Un historien, un petit-fils de marchand de tabac, un médecin, … chinent alors à droite à gauche en Belgique, en France, en Europe. Rapidement, la collection s’avère suffisante pour ouvrir un premier musée en 1987, agrandi en 2003.

Aujourd’hui, enrichi également de collections d’autres musées qui ont fermé leurs portes en Belgique ces dernières années (Pijp en Tabak à Harelbeke, Collection Vander Elst et Belga à Anvers), le Musée national du tabac regroupe ainsi 12 000 objets, sans compter les plus petites pièces comme les bagues de cigare, etc. Au fil des vitrines, on trouve ainsi des boites à cigarettes, des affiches, des tableaux, des pipes tantôt en écume de mer, en bois ou en porcelaine, des tableaux, des emballages, de vieilles publicités… Jusqu’au porte-pipe allemand qui représente des soldats des nations ennemies, ou encore cette seringue à tabac, certainement l’objet le plus ancien du musée: elle servait à injecter de la fumée de tabac dans l’anus, car il fut un temps où le tabac était considéré comme un médicament…

Cette plongée dans l’histoire et la sociologie du tabac est d’autant plus intéressante qu’elle s’accompagne depuis cette année d’une nouveauté: un escape game «RIP Philippe». Le pitch? Un magnat du tabac a défendu fidèlement les intérêts du secteur du tabac en fraudant la législation. Quand son fils meurt d’un cancer du poumon, provoqué par le tabac, il est pris de remords et s’apprête à révéler une enquête de santé confidentielle. Il n’en a pas le temps, empoisonné par le cartel du tabac. À vous de trouver les fameux papiers dans une scénographie spéciale reprenant des collections du musée. «L’intrigue de l’escape game, accessible à partir de 12 ans, est aussi là pour mettre les points sur les “i” sur l’industrie du tabac, pas la valoriser», explique la conceptrice de l’escape game, Carla Alaimo.

Une volonté de travailler en transfrontalier

Cet escape game, qui sera prolongé en 2025, est évidemment un moyen d’attirer plus de monde. Actuellement, le musée compte sur 5 000 à 10 000 visiteurs par an, estime Steven Masil, son coordinateur: «Le sujet du tabac n’est pas toujours le plus recherché. Quand nous avions fait une exposition érotisme et tabac, ça avait évidemment fait décoller les visites, mais l’époque n’est plus vraiment à cette association!» Parmi ces visiteurs, 20 à 25% sont français, même si ceux-ci hésitent à venir, pensant parfois que rien ne sera traduit. «Tout l’est, et, en général, ils sont ravis quand ils viennent!»

Si le musée a travaillé avec quelques établissements du nord de France, comme ceux de Tourcoing ou Godewaersvelde, Steven Masil aimerait relancer la machine, grippée avec la période du COVID. «Nous devons plus creuser cette dimension transfrontalière. D’ailleurs, nous échangeons actuellement avec d’autres musées pour la traduction des cartels. Nous aimerions les confier à des natifs de la langue en question, il y a donc certainement des échanges à faire avec les institutions françaises».

Le Musée national du Tabac
Montard

Nicolas Montard

Journaliste free-lance et cofondateur du magazine en ligne DailyNord.

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