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arts, pays-bas français

Art mural dans la métropole lilloise

Par Bart Noels, traduit par Jean-Philippe Riby
16 juin 2021 5 min. temps de lecture

Voilà un certain temps déjà que le street art est en vogue dans la région lilloise. Il constitue une activité florissante, de plus en plus présente et soutenue ces dernières décennies. Il apporte dynamisme, gaîté et parfois poésie à la grisaille des rues bordées de façades en brique. Par ailleurs, le street art est engagé. Certes, les œuvres visent à séduire, mais elles abordent en couleur les questionnements contemporains. Un nouveau guide présente de nombreux murs à travers différents parcours.

Ne confondez pas tags et street art. Les graffitis des arrêts de bus n’ont rien à voir avec les œuvres d’art remarquables omniprésentes dans la région de Lille. «Laissons de côté les petits murs et les petits endroits. Notre écosystème comporte des débutants, des taggeurs et des artistes professionnels. Nous nous respectons», explique Julien Prouveur, président du Collectif Renart. Ce groupe est responsable des œuvres d’art qui recouvrent des façades entières un peu partout dans l’agglomération lilloise. Groupe d’amis au départ, le Collectif Renart est devenu au fil du temps une large association composée de professionnels, et souvent consultée par les collectivités locales et les organisateurs de manifestations artistiques comme Lille3000. Pourtant l’esprit d’origine est demeuré intact. «Nous rendons la ville aux gens», dit Julien en me montrant avec fierté une œuvre de l’artiste mexicain Spaik, à la station de métro Porte de Douai: un dragon qui se déroule avec élégance sur le béton de la ligne. Nous travaillons très souvent avec des artistes internationaux. L’aspect humain est déterminant. Il faut que le courant passe. Que ça aille bien »

Depuis 2013, le Collectif Renart organise la BIAM ou Biennale Internationale d’Art Mural. Au cours des différentes éditions, plus de soixante fresques murales ont été réalisées. Des parcours guidés permettent de les découvrir. La biennale se poursuit jusqu’au début juillet, mais rien n’empêche de tout voir soi-même, à l’aide d’un plan.

L’art mural se veut attractif. Il apporte de la couleur dans la ville. Mais aussi du sens. Dans le quartier Union, à cheval sur Roubaix et Tourcoing, on peut voir des murs entiers racontant le passé industriel de ces villes. «J’aime beaucoup les œuvres dans lesquelles l’artiste livre un message», avoue Julien. «Jade Rivera, un Péruvien, a peint à Wazemmes un homme portant un iceberg sur son dos. La fresque fait réfléchir quand on passe devant. Chacun a son interprétation», ajoute-t-il. L’art mural renvoie au patrimoine, au climat, au logement, à la sécurité et aux autres thèmes contemporains. L’engagement sous-jacent ou manifeste a toujours été présent sur la scène du street art.

Il est difficile de dire que le street art est encore underground, c’est-à-dire un art en marge. Comme le montre, du reste, le Guide du street art Lille Métropole Lille – Roubaix – Tourcoing, récemment paru aux éditions Alternatives (Gallimard), avec le généreux soutien de Hello Lille, l’agence d’attractivité de la métropole. Dans ce guide, des photographies d’œuvres, par dizaines, des biographies d’artistes et des plans permettent d’admirer toutes ces beautés. Il est ainsi non seulement possible de déambuler dans le quartier de la gare, bien connu, le Vieux-Lille ou Wazemmes, mais aussi dans des quartiers populaires comme Saint-Sauveur et Moulins.

Le guide illustre magnifiquement ce que la métropole offre au regard. Une grande diversité de styles et de réalisations. Des œuvres très modestes, dans un petit coin, jusqu’à des pignons ou façades d’immeubles d’habitation, et tout ce qu’on peut découvrir entre les deux.

Le guide présente en outre Roubaix et Tourcoing, deux villes plus au nord dans lesquelles l’art mural est présent depuis des décennies. Au départ, dans les sites industriels à l’abandon et les lieux urbains peu avenants, puis, depuis des années, également dans les sites en vue des villes, encouragé enfin par les collectivités locales. Comme à Lille, le street art est resté underground, en marge des circuits officiels, jusque dans les années 1980. Des artistes ont alors investi les friches industrielles pour leur redonner couleur et vie. JonOne, un artiste qui travaillait à New York et à Paris, est ainsi venu créer un atelier à Roubaix. Il y travaille avec l’artiste roubaisien Mikostic.

Marketing urbain

Lille a voulu créer un lieu dédié aux «cultures urbaines», auxquelles appartient le street art: le Flow, un centre eurorégional des cultures urbaines. Roubaix le fait à travers le festival Expériences Urbaines #XU, qui en est à sa septième édition, avec pour thème la Renaissance. Pour Roubaix, il faut aussi mentionner les Ateliers RemyCo, un lieu de présentation et de création.

Ce n’est pas un hasard si les offices de tourisme assurent la promotion du street art. Celui-ci est devenu un instrument de marketing urbain grâce auquel les municipalités peuvent se donner une image jeune et branchée. Ostende en fait l’expérience depuis des années avec The Crystal Ship, un festival dans lequel le curateur Bjørn Van Poucke s’est engagé. Le parcours attire les visiteurs dans le centre-ville, pour une fois en dehors de l’itinéraire traditionnel entre la gare, le parking et la plage. Depuis des années aussi, Roubaix ne se fait pas prier pour décliner le concept: la ville met à l’honneur les graffitis existants, mais organise également elle-même des festivals. Roubaix mise fortement sur une image de créativité.

«Rien à redire à cela», observe Julien, du Collectif Renart. «Nous collaborons aussi avec des municipalités, mais nous défendons résolument notre liberté artistique. Nos maîtres d’ouvrage ne voient jamais ce qu’il y aura sur le mur avant que la réalisation ne soit achevée. Nous dialoguons, bien entendu.»

Pour sa part, Julien souhaite créer un parcours artistique transfrontalier le long de l’eau, avec la participation d’artistes et de collectifs français et belges. Le Collectif Renart a déjà fait beaucoup le long de la Deûle et de la Marque. Pouvoir relier ces réalisations à la dynamique du street art à Courtrai, Tournai et Rouliers constituerait un beau projet.

L’art urbain était déjà accessible. Aujourd’hui, il existe aussi des festivals, des plans et surtout un excellent guide. Les frontières ne sont plus guère un obstacle. Vous pouvez partir à la découverte des rues de l’Eurométropole. Surprises garanties!

Bart-noels

Bart Noels

journaliste freelance et initiateur du projet francobelge.news

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