«deBuren» sélectionne Maxime Garcia Diaz pour le festival «Transpoesie»
Inspiré par la Journée européenne des langues, célébrée chaque année le 26 septembre, le festival de poésie Transpoesie met depuis dix ans l’accent sur la diversité linguistique. Cette année, des poètes de 26 pays et régions d’Europe partageront des vers dans leur langue maternelle, avec des traductions en français, en anglais et en néerlandais. Les poèmes sélectionnés seront affichés dans les trams, les bus et les métros de Bruxelles.
La maison flamando-néerlandaise de la culture et de débats deBuren
sélectionne chaque année la candidature néerlandaise. Cette fois-ci, deBuren a choisi la poétesse Maxime Garcia Diaz.
En 2018, Maxime Garcia Diaz a participé à une tournée aux Pays-Bas et en Flandre à bord du PoëzieBus. Un an plus tard elle a remporté le championnat néerlandais de poésie slam, année où elle a également participé à la résidence d’écriture orgnisée par deBuren à Paris. Maxime Garcia Diaz écrit sur le phénomène Internet, sur les corps et sur des filles aussi tristes que des membres de la Résistance. On peut lire certains de ses écrits sur tinyletter.com/maximegarciadiaz
Le 14 octobre, Maxime Garcia Diaz fera une apparition virtuelle pendant une des soirées de Transpoesie. Elle récitera des vers que vous pouvez lire ici pour la première fois en traduction française.
arrête donc de squatter la faim
slowly heating sweetened milk
to create a substance
similar to caramel (1).
Le corps commence à battre
nauséeux comme un cœur cancérogène
bat ou comme Il s’évide tout seul.
Peu à peu se remplit d’une fumée qui s’amplifie
et tu te sens branche nue qui cherche
à toucher un nuage, ou à perforer
un hymen noir de jais
hay lugares inhabitables (2).
(le bus roule sur l’avenida 8 de octubre,
un vieil homme trébuche, tu respires tel un chien malade
ou un jean porté par une fille de 11 ans
qui ne veut pas aller à l’école)
el nombre del padre
la topografía del hambre (3)
Le corps se tait. Le corps refuse
de respirer,
écume de rage. Des vagues frappent
le voile du palais, à croire que
personne n’a jamais encore
été couché dans la mer,
regardé les nuages, et dit : voilà ce que je veux être.
Voilà ce que je veux être quand il fera nuit.
(le bus roule sur l’avenue italia, une personne marmonne un truc
à propos des kilocalories, une peau se fait pousser des poils
pour avoir chaud
pendant un hiver qu’elle s’impose)
no quiero comer (4)
Tu te recroquevilles comme une crevette ou comme le recroquevillement – un truc qui pourrait pourrir
avant de s’émietter.
Tu t’imagines chiendent, te rends compte que c’est là aussi une sorte de narcissisme.
Le corps commence
à s’annuler
~
je veux mon corps suffisamment grand
pour gratter les nuages,
ma tête royale
le manger de soleils
puis le manger de systèmes solaires
puis le manger d’humains
puis de peau, puis de cheveux, puis d’artères et de veines
que je mâche à en faire des semences
avant de les planter
sous ma surface.
hay lugares inhabitables (5).
je veux mon corps suffisamment grand
pour manger des soleils puis
les vomir, pour créer des religions neuves
au-dessus de la cuvette des chiottes.
haha regardez-moi rendre un culte.
divin. cinq fois par jour.
je m’empiffre de cendre
pour déplier d’ici peu mes plumes
pour me préparer
à une résurrection
quiero que mi cuerpo tiemble como la tierra
no tengo ancestros
no tengo fuente
soy una cosa perforada y no tengo sombra (6)
je veux mon corps grandeur nature
comme une jeune maison, une vieille colère
un océan atlantique. comme un soleil
qui s’imagine système solaire.
como una furia. como una violencia (7)
comme un corps.
~
most of the water
in the milk
evaporates
and the mix thickens (8).
en été
de gentilles petites araignées
crapahutent dans ma bouche
y posent leurs œufs
exposent
qu’elles ne sont plus comme avant.
ça c’étaient nos frères et nos sœurs,
disent-elles.
c’était aussi ma petite sœur, je réponds
qu’on entendait pleurer comme un animal.
ce n’était pas moi
ce mythe violent
cette naissance
dans la bouche d’un fusil