Miroir de la culture en Flandre et aux Pays-Bas

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Miroir de la culture en Flandre et aux Pays-Bas

Fenêtre sur l'art moderne et l'art brut, le LaM célèbre ses 40 ans
© Dirk Van Assche
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Fenêtre sur l'art moderne et l'art brut, le LaM célèbre ses 40 ans

À Villeneuve-d'Ascq, le musée d'Art moderne et d'art brut –en bref le LaM– fête son anniversaire et crée l’occasion pour une année entière de célébrations. Ce n’est pas tant le nombre d'années qui compte, mais le résultat: en 40 ans, le musée a rassemblé des collections particulièrement intéressantes. Un patrimoine que plusieurs généreux donateurs ont aidé à constituer.

Le musée du LaM à Villeneuve-d'Ascq fête ses 40 ans. Pour une institution de ce type, ce n’est pas un âge exceptionnellement avancé. À titre d’exemple, le palais des Beaux-Arts de Lille a plus de 200 ans et le musée des Beaux-Arts de Gand fête cette année ses 225 ans. La particularité est ailleurs: le fait qu’en si peu de temps, le LaM soit devenu un musée majeur pour l'art du début du XXe siècle et, depuis 2010, pour l'art brut également.

Une famille passionnée d'art moderne

L'histoire du LaM commence par une donation. En 1979, les époux Jean et Geneviève Masurel font don à la métropole lilloise d'une partie de leur importante collection d'œuvres d'art. Jean Masurel, entrepreneur issu du nord de la France, avait lui-même hérité de son oncle Roger Dutilleul une importante collection d'art moderne.

Dutilleul était dans la première moitié du XXe siècle l'un des plus grands collectionneurs d'art français. Amateur d'art moderne, il a investi la majeure partie de ses revenus dans sa collection, rassemblée pour la plus grande partie entre 1907 et les années 1920. Sur les conseils du galeriste parisien Daniel-Henry Kahnweiler, Dutilleul s'est intéressé principalement à la peinture fauve et cubiste. Lorsque la Première Guerre mondiale a éclaté, il possédait plus de 50 œuvres cubistes de Picasso et de Braque. Plus tard, Dutilleul est devenu un grand amateur de l’œuvre d'Amedeo Modigliani. En 1925, il avait acquis trente-quatre peintures et vingt-et-un dessins de l'artiste italien. Il a également acheté des œuvres de Paul Klee, Joan Miró, Vassily Kandinsky et Chaïm Soutine, entre autres.

À sa mort en 1956, Dutilleul a légué sa riche collection à son neveu, Jean Masurel. Avec son épouse, ce dernier avait lui-même déjà constitué une impressionnante collection. Masurel s’intéressait quant à lui aussi aux artistes du nord de la France, de qui il a acheté quantité d’œuvres. Le musée possède ainsi des créations d'Eugène Dodeigne, Eugène Leroy, Jean Roulland et Arthur Van Hecke, entre autres. En 1979, Jean et Geneviève Masurel ont donc légué 219 œuvres de leur collection à la Communauté urbaine de Lille à condition que cette collection soit rendue accessible au public. Le couple a ensuite collaboré intensément à la création d'un musée pouvant accueillir sa collection.

La conception de ce musée a été confiée à Roland Simounet, qui s'est illustré par la suite en imaginant le musée Picasso à Paris. Simounet a opté pour une architecture sobre aux formes géométriques. L'aile située du côté est abrite les différents services, le dépôt, la bibliothèque et le café, tandis que l'aile ouest accueille les expositions. Le musée bénéficie d'une grande luminosité. Son espace intérieur est en contact permanent avec le parc de 23 000 m2, où se trouvent une douzaine de sculptures, entre autres de Picasso, Richard Deacon, Alexander Calder, Jacques Lipchitz, Eugène Dodeigne. Le musée n’a pas tardé à être classé monument historique, en 2000.

Nouvelle collection, nouveau bâtiment

En 1999, une nouvelle donation marque l’histoire du musée. L'association française Aracine lègue alors au LaM l’intégralité de sa collection d'art brut. Fondée en 1982, Aracine était une association qui s'intéressait principalement à l'art brut. Elle organisait des expositions et a constitué une collection. L'art brut, parfois aussi appelé art outsider, réfère aux œuvres d'artistes travaillant en dehors du circuit professionnel de l'art. Il s'agit par exemple de patients psychiatriques, de personnes souffrant d'un handicap mental ou qui luttent pour trouver leur place dans la société. La collection Aracine regroupe plus de 3 500 œuvres. Cette donation était elle aussi liée à une condition: l'organisation d'une exposition au moins une fois par an et la création, au sein du musée, d'un nouvel espace réservé à la collection.

Cette fois, c’est l'architecte parisienne Manuelle Gautrand qui s’est vu confier, en 2002, l’agrandissement du musée. Elle a créé une architecture plutôt introvertie où des volumes organiques viennent embrasser l'arrière du bâtiment d'origine. La lumière extérieure qui pénètre dans cette aile est filtrée par des fenêtres joliment conçues: une approche architecturale qui est à l’écoute de la fragilité de certaines œuvres d'art, tout en créant un aspect extérieur original.

Les différentes collections du musée sont en outre reliées entre elles de manière naturelle, conformément au souhait du maître d'ouvrage. Le musée de Villeneuve-d’Ascq est ainsi l'un des premiers musées à réunir dans un parcours original des domaines artistiques auparavant proposés séparément. Au bout de quatre ans, le LaM rénové a rouvert ses portes en 2010. À cette occasion, le musée a changé aussi de nom. Le nom initial de «musée d'Art moderne Lille Métropole» s’est transformé en «Lille Métropole musée d'art moderne, d'art contemporain et d'art brut», soit LaM, en version abrégée.

Enfin, une troisième collection essentielle a été léguée au musée de Villeneuve-d'Ascq en 1994. Cette année-là, Dominique Bozo, ancien président du Centre Pompidou, a fait don au LaM de l’intégralité de sa bibliothèque consacrée à l’art. Ce fonds de 5 500 volumes, dont certains rares, a été élargi en 2003 avec une autre collection de livres. Il s’agissait d’un legs de Maurice Jardot, ancien directeur de la fameuse galerie Kahnweiler, où Roger Dutilleul avait acheté nombre de ses tableaux. Aujourd'hui, la bibliothèque Dominique Bozo rassemble plus de 55 000 ouvrages et comprend un important fonds sur l'art brut. À ce titre, il constitue un centre d'études incontournable.

Expositions temporaires

En plus de sa collection d'art moderne et d'art brut, le LaM possède également des œuvres d'artistes contemporains marquants, français et étrangers. Ce fonds compte environ 1 000 œuvres et réunit des artistes reconnus et de jeunes artistes émergents. Régulièrement, le musée organise des expositions temporaires consacrées aux créations d'artistes contemporains. En 2020, par exemple, le LaM a présenté l'œuvre de l'artiste sud-africain William Kentridge, exposition qui a rencontré un grand succès, aussi à l'étranger.

Mais l’art contemporain n’a pas le monopole de ces expositions temporaires. Parmi les expositions les plus appréciées du public, il y a celles consacrées aux artistes de la première moitié du XXe siècle. Citons celles qui ont célébré l’œuvre de Miró ou de Modigliani. En 2019, la très belle exposition consacrée à Giacometti a accueilli plus de 115 000 visiteurs. Et en 2021-22, malgré la pandémie de Covid, 60 000 personnes ont visité l’exposition Paul Klee.

Pour marquer son 40e anniversaire, le LaM a préparé un vaste programme d’activités. Trois expositions temporaires sont prévues. La première, consacrée à l'œuvre du sculpteur nippo-américain Isamu Noguchi, s'est tenue jusqu'au 2 juillet. Il s'agissait de la première rétrospective en France d'une des grandes figures de l'art moderne. Le 23 septembre prochain, une nouvelle exposition ouvrira ses portes. Organisée en collaboration avec le Palais de Tokyo de Paris, elle sera consacrée à Mohamed Bourouissa, artiste franco-algérien de renommée internationale. Bourouissa explorera la relation de la société contemporaine avec l'autorité, le contrôle, l'enfermement et la surveillance.

Enfin, la troisième exposition de cette année festive débutera le 6 octobre. Elle fera la part belle à l'un des principaux artistes allemands depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale: Anselm Kiefer. L'accent sera mis à cette occasion sur le rôle de la photographie dans l’art de Kiefer. Cet artiste capte constamment des lieux, des situations, des performances et des horizons, et puise ensuite dans ce matériel pour créer ses œuvres. La photographie est omniprésente dans ses créations mais cet aspect, aussi essentiel soit-il, est rarement rendu visible. L’exposition Kiefer sera à n’en pas douter un moment fort de cette année de célébration.

Les collections permanentes du musée sont quant à elles présentées différemment tout au long de l’année festive 2023. Par exemple, les séparations habituelles entre périodes et styles différents ont été abandonnées en faveur d’un agencement qui privilégie la mixité. À travers leurs œuvres, les artistes de l'art brut côtoient maintenant des artistes modernistes de premier ordre. Cela permet surtout de valoriser l’art brut en supprimant l’étiquette d’outsider, et les visiteurs se rendent mieux compte qu’il s’agit avant toute chose d’artistes intéressants.

Le LaM de Villeneuve-d'Ascq vaut vraiment le détour et il mérite que l’on s’en rende plus compte, y compris de l'autre côté de la frontière toute proche. Un seul billet vous donne accès à trois collections de grande valeur.

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