«La pensée et la jeune fille»: un poème de Maria Barnas
Marie Barnas (° 1973) est une écrivaine, poète et artiste visuelle néerlandaise. Elle a publié des romans, de la poésie et des essais en plus de présenter ses œuvres d’art visuel dans plusieurs galeries, dont à New York et à Berlin. Sa poésie a été récompensée par de nombreux prix. «La pensée et la jeune fille» est extrait du recueil Jaja de oerknal (De Arbeiderspers, Amsterdam, 2013) pour lequel Barnas a reçu en 2014 le prix Anna Bijns. Une sélection de ses poèmes a paru dans une traduction française de Jan H. Mysjkin avec l’œil complice de Pierre Gallissaires dans le recueil trilingue Poèmes (édition La Traductière, 2017).
© Tineke de Lang
La pensée et la jeune fille
Les prés et les maisons se succèdent dans le coin de l’œil
alors que j’essaie de me concentrer sur la jeune fille
assise en face de moi. Bien des choses entrent dans le coin de l’œil.
Une maison que je reconnais un canal une vache et même
la rumination et le regard vide de l’animal qui tend
le cou dérangé par un bruit inconnu.
Ou qui se raidit en attendant un signe?
Les animaux se multiplient à la périphérie.
Se résignent à ces terres marécageuses qui s’affaissent
avec leurs maisons repoussantes qu’une par une
j’ai autrefois habitées. La jeune fille tient un livre
avec des coupes transversales du cerveau sur ses genoux.
Elle cercle les lobes et les ventricules et discerne
que je peux penser à elle encore et encore.
Het denken en het meisje
Weilanden en huizen verglijden in mijn ooghoek
terwijl ik me probeer te concentreren op het meisje
dat tegenover me zit. Er past veel in een ooghoek.
Een huis dat ik herken een sloot een koe en zelfs
het grazen en verloren turen van het dier dat de nek
strekt gespannen van een onbekend geluid.
Of wacht het strammer op een teken?
Dieren vermenigvuldigen zich aan de rand.
Schikken zich in dit verzakkende moerasland
met stuitende huizen waarin ik stuk voor stuk
heb gewoond. Het meisje klemt een boek
dat doorsneden van de hersenen toont op schoot.
Ze omcirkelt kwabben en ventrikels en ontleedt
dat ik aan haar kan denken en denken.