«Notre flamand maternel» ? Les Flamands de Belgique parlent le néerlandais
Les Flamands de Belgique ou Belges néerlandophones parlent le néerlandais et non le flamand. Un petit regard dans le passé littéraire et politique.
L’écrivain flamand Cyriel Buysse n’a pas été éduqué en français, mais n’imaginait pas, au début de sa carrière littéraire, à la fin du XIXe siècle, écrire en «flamand»: «Une fois pour toutes, il faut avoir le courage de l’avouer, le flamand n’est qu’une pauvre petite langue et un écrivain ne peut que regretter profondément de ne pas disposer d’un meilleur véhicule pour ses idées.» C’est surtout parce que son français n’était pas assez bon – ce que son bon ami Maurice Maeterlinck lui a dit sans ambages – qu’il a fini, fort heureusement, par se tourner vers le néerlandais.
«Je crois que vous avez très bien fait de revenir carrément à notre flamand maternel», lui écrit Maeterlinck. Notons au passage l’usage du pronom personnel «notre» et de la confusion entre néerlandais et flamand. Maeterlinck estimait que Buysse avait eu raison de faire appel à la langue du peuple et qu’il ne pouvait le faire que dans cette langue, et non en français, langue qu’il maîtrisait mal. Pour Maeterlinck, néanmoins, cette langue n’était pas le «néerlandais».
Jules Destrée est le socialiste wallon qui écrit en 1912 au roi Albert Ier une lettre ouverte contenant la célèbre phrase: «Sire, vous régnez sur deux peuples. Il y a en Belgique des Wallons et des Flamands; il n’y a pas de Belges.»
Plus important encore dans cette lettre est ce qu’il dit des Flamands: «Ils nous ont pris la Flandre.» Il avait bien compris que les francophones étaient en train de perdre leur droit d’utiliser leur langue en Flandre dans la sphère publique. Le mouvement flamand avait entre-temps retenu la norme linguistique du Nord. Il n’avait d’autre choix que de faire contrepoids à l’hégémonie du français par une langue de culture existante, même si celle-ci était en fait celle d’un autre État. Les Flamands ont dû apprendre le néerlandais plus ou moins comme une langue étrangère. Il y a quelques décennies encore, la plupart des Flamands passaient de leur dialecte au néerlandais. Le français reste vivace. D’où des malentendus cocasses: Un Flamand doit substituer aanhangwagen au mot remorque et bestelwagen à camionnette. À l’inverse, il utilisera les termes duimspijker et regenscherm et sera taxé de purisme par les Néerlandais, qui disent punaise
et paraplu.