Mine de rien, Genk s’en sort bien
Lors d’une visite à Genk, Derek Blyth découvre des mines de charbon métamorphosées, des poules cosmopolites et l’une des plus grandes chansons d’amour au monde.
Marina, Marina, Marina.
Assis dans un train se dirigeant lentement vers Genk, je n’arrive pas à me sortir une vieille chanson de la tête. Elle a été composée par Rocco Granata, fils d’un mineur italien, qui a grandi à Genk dans les années 1950. Cette simple chanson d’amour est devenue un succès mondial. L’histoire improbable du chanteur a fait l’objet d’un film en 2013 réalisé par le Belge Stijn Coninx.
Mi sono innamorato di Marina: c’est ainsi que commence la chanson. Plus de 50 ans après sa sortie, elle n’a rien perdu de sa fraîcheur et de son optimisme. Il semblerait que beaucoup de Belges âgées s’appellent Marina parce que leurs parents aimaient cette chanson. Et pourtant, elle provient d’une ville minière morose qui, à l’époque, était entourée de chevalements et de terrils.
Je suis descendu du train avec un objectif en tête: partir à la recherche des origines de Rocco Granata. L’histoire commence lorsque Rocco, âgé de 21 ans, enregistre une chanson avec son groupe. Elle s’intitulait «Manuela». Il s’est rendu compte qu’il avait besoin d’une face B pour en faire un single, alors il a enregistré une chanson improvisée intitulée «Marina» pendant que le reste du groupe n’était pas au studio. Mais les maisons de disques n’étaient pas intéressées par un Italien lambda qui travaillait comme mécanicien dans un garage Vespa. Rocco a dû trouver lui-même les fonds nécessaires pour produire les 300 premiers exemplaires et essayer de les vendre auprès des disquaires locaux. Sa première cliente a été Betty Peeters, qui tenait un magasin de disques et un discobar au 119 Vennestraat. Elle en a acheté 25 exemplaires.
Aller voir Betty était donc ma première piste. J’ai loué un vélo pour m’y rendre. Cela me semblait être la bonne chose à faire à Genk. Cette ville est située dans le Limbourg, la province qui se présente comme une destination vélo. De plus, la plupart des endroits que je devais visiter se trouvent en périphérie de la ville. Trop loin pour y aller à pied, mais parfait pour s’y rendre à vélo.
Malheureusement, le disquaire n’était plus là. Un petit message sur une porte en verre rappelait le bref moment de gloire de Betty. Le magasin avait été remplacé par un bar à vin à la façade en verre moderne. Cependant, j’ai remarqué que l’ancien bâtiment en briques derrière la vitre avait été préservé. À la mémoire de Betty, ai-je appris plus tard.
© Stad Genk
La chanson Marina est montée dans les classements. Rapidement, des maisons de disques se sont présentées à la porte de la famille Granata avec des contrats à signer. Marina se vendra à plus de 100 millions d’exemplaires. Rocco sera invité à New York pour se produire au Carnegie Hall. Selon le cuisinier privé de John F. Kennedy, celui-ci aimait siffler l’air entraînant de Rocco.
Le jeune Italien de Genk avait choisi la bonne voie. Au milieu des années 1960, les mines dans lesquelles travaillait la génération de son père commençaient à fermer. Cela a été un coup dur pour des milliers de familles qui avaient émigré vers le nord à la recherche d’un emploi.
Les Genkois avaient compris qu’il fallait trouver un plan B. En 1962, la société automobile Ford s’est laissé convaincre de construire une grande usine à l’extérieur de Genk. La nouvelle usine américaine semblait être une valeur sûre. Toutefois, les beaux jours ont pris fin en 2014, lorsque Ford a annoncé la fermeture de l’usine de Genk, entraînant la perte de quelque 4 000 emplois.
© Johnny Harsch / archives Emile Van Dorenmuseum, Geheugen van Genk
Le 18 décembre 2014, les cloches de l’église de Genk ont carillonné à midi. Le bourgmestre de la ville avait appelé à un «moment de bruit» le jour de la fermeture de l’usine: les travailleurs et les habitants criaient, klaxonnaient, faisaient retentir les sonnettes des vélos et tapaient sur les pots et casseroles. Alors que la dernière Ford Mondeo sortait des chaînes de montage, la ville limbourgeoise fragilisée semblait au bord du gouffre.
Mais elle ne l’était pas. Contrairement à nombre d’anciennes villes minières dans le monde, Genk avait un plan. Si l’usine Ford était le plan B, la ville avait encore un plan C. C comme culture, comme je l’ai découvert plus tard dans la journée en visitant l’ancien site minier de Winterslag, rebaptisé C-mine.
Un mémorial solennel en pierre se dresse à l’extérieur de la mine. On peut y lire: «Le 28 juillet 1914, le premier morceau de charbon du filon de la Campine a été extrait à cet endroit, à Winterslag, sous la direction du propriétaire visionnaire qu’était le baron Coppée.»
© archives Emile Van Dorenmuseum, Geheugen van Genk
Cependant, le moment était mal choisi pour lancer l’industrialisation de Genk. En effet, une semaine plus tard, l’armée allemande franchissait la frontière belge. La mine n’est devenue opérationnelle qu’en 1917, lorsque son charbon a été utilisé pour soutenir l’effort de guerre.
© Archives municipales de Genk
Le village limbourgeois s’est transformé en une ville en plein essor lorsque plusieurs autres mines ont ouvert dans la région. Les trois sites charbonniers de Genk ont finalement engagé plus de 18 000 travailleurs, parmi lesquels des migrants venus d’Italie, de Grèce, du Portugal, du Maroc et de Turquie qui s’y sont installés après la Seconde Guerre mondiale.
Or, le secteur du charbon a commencé à régresser dans les années 1960. La mine de Winterslag a fermé en 1988, laissant derrière elle un site abandonné. De l’autre côté de la mer du Nord, en Angleterre, le gouvernement s’emploie à démolir les anciennes mines pour créer de nouveaux sites industriels. Plus près d’ici, les mines de charbon néerlandaises ont été démolies dans le but de transformer le paysage «noir» en paysage «vert». Cependant, le Limbourg a adopté une autre approche. Plutôt que de tout démolir, il a décidé de donner une nouvelle vocation à certains bâtiments. Ainsi, 11 des 45 bâtiments d’origine de la mine de Winterslag ont été classés comme monuments protégés en 1993. Le reste a été démoli.
© Johnny Harsch / archives Emile Van Dorenmuseum, Geheugen van Genk
Aujourd’hui, l’immense site industriel est devenu un pôle créatif et dynamique, C-mine. Les anciens impressionnants bâtiments de la mine datant de 1917 ont été préservés, notamment une salle des machines pleine d’appareils enduits de graisse, la lampisterie et le bâtiment des bureaux. Surplombant le site, les deux chevalements d’extraction squelettiques et leurs énormes roues s’élèvent au-dessus des toits, vestiges du passé de Genk.
© C-mine
Le complexe comprend aujourd’hui des bureaux, une brasserie et un office du tourisme. Il abrite également une galerie d’art et un labyrinthe moderne en acier dans la cour extérieure. Vous pouvez vous promener en passant par la grande salle des machines et son magnifique sol carrelé, ses élégants escaliers en fer et ses anciens panneaux de contrôle.
© C-mine
On peut même descendre sous terre. L’Expédition C-mine est une attraction qui vous emmène dans des tunnels de ventilation en briques où vous serez confronté à des bruits étranges, des effets spéciaux visuels et même l’odeur des mines. La visite se termine par l’ascension raide d’un escalier en colimaçon jusqu’au sommet du chevalement, à quelque 60 mètres au-dessus du sol.
Un panneau d’information insiste sur le fait que ce n’est pas un musée. La mine n’a pas vocation de devenir un lieu de mémoire. Ou du moins, pas seulement. Le site accueille un cinéma (situé dans la lampisterie, où les mineurs récupéraient leurs lampes). Il y a aussi une école d’art à côté de la mine, ainsi que des sociétés de technologie, une crèche et l’atelier du céramiste mondialement connu Piet Stockmans. Le programme annuel de la mine se présente sous la forme d’un livret de 120 pages regorgeant d’expositions, de spectacles et de conférences.
© C-mine
Ce n’est donc pas un simple musée, mais le passé est toujours présent dans les vieilles photos exposées de part et d’autre du site. Sur ces photos, on aperçoit les salles des machines, l’équipement et les visages des mineurs qui ont passé une grande partie de leur vie sous terre. Le premier morceau de charbon extrait du sol campinois est exposé dans une vitrine.
C’était un travail ardu. Peut-être pas aussi pénible que de travaille dans les mines dans d’autres régions, cependant. Les bâtiments, eux, ont été conçus par l’architecte bruxellois Adrien Blomme. Pendant la Première Guerre mondiale, il se trouvait en Angleterre, où il avait étudié la conception des cités-jardins anglaises. Il s’est inspiré de ce style dans la conception de plusieurs communautés de mineurs, notamment la cité-jardin de Winterslag, où les familles de mineurs vivaient dans de belles maisons dotées de grands jardins. Les enfants jouaient dans des rues bordées d’arbres et fréquentaient des écoles respectables.
© Johnny Harsch / archives Emile Van Dorenmuseum, Geheugen van Genk
L’office du tourisme de C-mine propose un ensemble de brochures regorgeant d’idées inspirantes pour passer une journée à Genk, y compris dix coins parfaits pour pique-niquer. De nombreuses idées reprennent des itinéraires vélo, dont un qui relie les trois sites miniers de Genk en utilisant le système de points-nœuds avec des balises numérotées.
C’est parfait, me suis-je dit. Ce système a été inventé par Hugo Bollen, un ingénieur qui travaillait dans les mines du Limbourg. Inspiré par les voies d’évacuation d’urgence utilisées par les mineurs, il a créé un système de navigation simple basé sur des balises numérotées.
Je me suis rendu au site minier suivant, à 15 minutes de route. La mine s’appelait autrefois Zwartberg, mais le nom a disparu, comme la plupart des bâtiments. Il ne reste que la grande maison autrefois occupée par le directeur de la mine.
© Archives Emile Van Dorenmuseum, Geheugen van Genk / © Koen Vanmechelen, Stad Genk, photo Tony van Galen
Après la fermeture de la mine, les bâtiments ont été démolis. Un café avec un lion en cage dans le jardin a vu le jour sur le site. Le café s’est ensuite transformé en un zoo privé comptant plus de 1 000 animaux, mais a dû fermer en 1998 pour cause de mauvaise gestion. L’artiste belge Koen Vanmechelen, connu pour son Cosmopolitan Chicken breeding Project, un projet d’élevage, a repris le site abandonné pour y construire un laboratoire expérimental appelé LABIOMISTA.
© Koen Vanmechelen, 2019, photo Enrico Cano
Il a demandé à l’architecte italien Mario Botta de concevoir un pavillon d’entrée d’un noir audacieux, désormais connu sous le nom The Ark. Ce pavillon mène à l’ancienne résidence du directeur, où Vanmechelen expose aujourd’hui des œuvres d’art reflétant son intérêt obsessionnel pour les poules et d’autres animaux.
Le bâtiment suivant est une immense serre. Plus loin, une zone sauvage a été transformée en terrain d’élevage pour des animaux tels que des lamas, des autruches et des dromadaires. Dans un champ situé de l’autre côté de la rue, Vanmechelen a développé un autre projet appelé Nomadland. Il y a créé une installation temporaire composée de tentes, de scènes en bois et de caravanes peintes. Le site est calme pendant la semaine, mais il s’anime les week-ends d’été, quand des aliments biologiques et durables sont servis pendant que des dromadaires apprivoisés et d’autres animaux se promènent.
© Koen Vanmechelen, photo Kris Vervaeke
Je suis remonté sur mon vélo. Encore 15 minutes jusqu’au prochain point-nœud. L’itinéraire était plus varié que je ne l’avais imaginé: il traverse des bois, des voies ferrées abandonnées et une lande sauvage. En chemin, j’ai aperçu d’immenses villas construites pour les directeurs de mines et d’imposantes églises en briques style art déco, financées par les propriétaires. Enfin, j’ai aperçu un autre grand chevalement. Il appartenait à la mine de charbon de Waterschei, qui a fermé en 1987 et est aujourd’hui rebaptisée Thor Park.
La mine employait autrefois 7 000 travailleurs, dont beaucoup venaient de Turquie et du Maroc. C’est notamment le cas du père de Zuhal Demir, qui, aujourd’hui, occupe le poste de ministre flamande de l’Enseignement, de la Justice et du Travail. Née à Genk, elle a fréquenté une école locale, obtenu son diplôme à la KU Leuven et est finalement devenue l’une des personnalités politiques les plus influentes de Flandre.
© Stad Genk
Thor Central, l’immense bâtiment administratif qui abritait également les salles de bains et les lampisteries, existe toujours. Il est plutôt vide, comparé à C-mine, mais tout de même impressionnant. Un escalier mène vers deux immenses salles aux murs couleur moutarde foncé, aux ferronneries élégantes et aux vieilles photos de mineurs.
Ici, les gens travaillent sur un projet différent. On trouve de petites entreprises dédiées à l’énergie verte, ainsi qu’un campus technologique et un incubateur. Pardon, un Incubathor. Récemment, le nouveau grand campus de recherche dédié aux entreprises de fabrication intelligente FacThory a ouvert ses portes.
© Stad Genk
Je commençais à comprendre vers quoi Genk se tournait. La ville est passée du charbon aux voitures, puis à la culture. Aujourd’hui, elle se concentre sur les technologies vertes. On lui a même inventé un nouveau slogan, qui joue sur les mots Genk et denk (réfléchir) qui donne alors Iedereen Genkt (tous les Genkois réfléchissent). Beau jeu de mots, me suis-je dit.
Aujourd’hui, le site minier sert d’entrée à un énorme parc naturel, le Hoge Kempen National Park (Parc national de la Haute Campine). Des dizaines de sentiers de randonnée et de pistes cyclables vous emportent dans la nature. Un sentier sinueux mène au sommet d’un terril parsemé d’arbres. Ce chemin étroit étant trop cahoteux pour un vélo, je l’ai emprunté à pied. La route était jalonnée d’étranges cairns de pierre appelés Steenmannetjes, littéralement des petits bonshommes de pierre.
© Stad Genk
Grâce à la vue d’ensemble sur le Thor Park, je me suis rendu compte que Genk n’était pas du tout ce à quoi je m’attendais. Ce n’était pas une triste ville industrielle où l’emploi avait disparu, mais bien une cité vibrante et dynamique tournée vers l’avenir. En un peu plus d’un siècle, elle est passée du charbon sale aux voitures à essence polluantes, pour aboutir aux technologies vertes. Si jamais les technologies vertes ne fonctionnaient, elle trouverait autre chose.
Du sommet du terril, j’apercevais le stade Racing Genk, où joue l’équipe locale. J’ai appris d’un supporter que le club a été créé en 1988 par la fusion de Thor Waterschei et de KFC Winterslag. Une équipe de football pour chaque mine de charbon. Le stade propose désormais une expérience de football interactive au nom de génie: Goalmine.
© Yannick Van Den Houdt
Je suis retourné dans le centre-ville en empruntant la rue Stalenstraat. Un panneau en début de rue indiquait Vallei van Werelden, littéralement: la vallée des Mondes. Ce nom tout droit sorti d’un roman de science-fiction désigne en réalité une simple rue commerçante flamande. Du moins, jusqu’à ce que j’observe les magasins de plus près: une boucherie marocaine, un restaurant grec et un barbier turc. J’ai fini par comprendre.
En migrant à Genk, les mineurs originaires de Grèce, Turquie, Portugal, Maroc, Espagne et Italie ont transformé ce village limbourgeois en l’une des villes les plus multiculturelles du Benelux. Chacune des nationalités présentes a apporté sa propre touche à la culture locale. Les Grecs ont apporté les pâtisseries sucrées, les Marocains, le couscous et les Turcs ont ajouté les baklavas sucrés à tout cela. La Stalenstraat reflète parfaitement l’identité cosmopolite de la ville, vous pouvez y acheter des tapis maghrébins, de grandes marmites pour faire bouillir des pâtes et des téléphones bon marché pour appeler à la maison.
© Stad Genk
De retour dans le centre-ville, connaissant l’histoire du déclin industriel de Genk, je m’attendais à ce que l’ambiance y soit maussade. Au lieu de cela, j’ai découvert un pêle-mêle de zones piétonnes animées, de magasins bondés et de cafés branchés.
La plus surprenante de mes découvertes a été la bibliothèque municipale. Un espace lumineux et spacieux composé de quatre étages entourant une vaste cour intérieure, conçu par Claude Vasconi. Le bâtiment contient plusieurs touches chaleureuses telles qu’un jeu d’échecs géant, un piano à queue ainsi qu’un dragon coloré, mais aussi une collection d’art contemporain incluant une installation de l’artiste belge Denmark nommée Brandhout (embrasement). Cette œuvre d’art est composée de dizaines de bâtons de bois enveloppés de magazines de luxe.
© Stad Genk
J’ai séjourné dans le centre-ville, au Carbon Hotel. Carbon pour le charbon. Les chambres étaient sombres et feutrées comme si leurs murs étaient recouverts d’une fine couche de poussière de charbon. Alors que je parcourais le tas de brochures que j’avais déjà accumulées, je suis tombé sur un projet urbain qui visait à encourager les gens du coin à proposer leurs idées pour améliorer la ville. Autant dire qu’ils ne manquaient pas d’idées inspirantes. Ma proposition préférée était celle de la création du «plus long spaghetti». Un spaghetti qui mesurerait plus de trois kilomètres de long et qui serpenterait dans les rues de Genk, comme pour rassembler les habitants de la ville.
Iedereen Genkt, pensais-je.
***
Le matin suivant, je suis parti pour une balade à vélo dans les forêts entourant la ville. Je me suis dirigé vers le Fietsen door het water (traversez l’eau à vélo), une attraction proche du musée en plein air de Bokrijk qui a pour but de permettre aux cyclistes de traverser un lac grâce à un pont en métal enfoui dans l’eau. Il s’agit d’un des nombreux projets mis en place par la province du Limbourg pour rendre le cyclisme un peu plus amusant.
De retour à Genk, j’ai traversé un magnifique pont cycliste qui surplombait le périphérique ouest bondé. Ce pont a été construit en 2014, dans le but de lier deux districts séparés par une autoroute à quatre voies. La construction en acier blanc mène les cyclistes dans une série de boucles, un peu comme des montagnes russes.
© Stad Genk
Il était déjà l’heure de dîner. «Tu devrais aller jeter un œil à la Vennestraat», m’avait conseillé un ami flamand. «Ils l’appellent la straat van de zintuigen, la rue des sens». Ladite rue n’était pas trop éloignée de la C-Mine. Je m’y étais déjà rendu, lorsque je cherchais le magasin de disques de Betty. Au premier coup d’œil, l’endroit ressemblait à une rue flamande ordinaire, c’est en y regardant d’un peu plus près que j’y ai remarqué un barbier turc, une épicerie fine italienne et un bar à tapas espagnol.
Plus tard, j’ai non seulement appris que quelqu’un faisait pousser des oliviers dans un jardin de la Vennestraat, mais aussi que le mari de Betty avait planté un vignoble à l’arrière du célèbre magasin.
© Stad Genk
On m’avait conseillé De Griekse Frituur, LE restaurant à tester. Il était caché dans l’impasse de la Vennestraat, juste à côté du périphérique bondé. Vous pensez sûrement qu’il ne s’agit de rien d’extraordinaire, pourtant ce restaurant grec était de loin l’un des endroits les plus conviviaux où j’aie mangé en Belgique.
Son histoire remonte à 1974, lorsque Nico et Anna ont décidé d’ouvrir un restaurant grec tout à fait ordinaire non loin de la mine Winterslag. Aujourd’hui, ce sont leurs petits-enfants qui perpétuent l’accueil grec chaleureux. L’intérieur du restaurant est décoré de photos de famille, de fleurs en plastique qui pendent des lampes et de drôles de bibelots. Le menu, lui, est basé sur la cuisine de rue grecque. J’ai commandé des calamars accompagnés de frites et d’une sauce maison, mon plat était servi dans du papier journal.
© Stad Genk
À la fin de mon séjour, j’espérais trouver un souvenir de Genk que je puisse ramener à la maison. Malheureusement, il était trop tard pour trouver des tomates. Chaque année, à la fin de l’été, Genk reçoit la livraison d’une cargaison de tomates provenant du sud de l’Italie. C’est Manuela Da Rotilio qui fait importer ces tomates dans le but de les vendre aux résidents italiens de Genk. Tout le monde est d’accord pour dire que les tomates italiennes sont un ingrédient incontournable à la préparation de la passata. Dès qu’elles sont mises au courant de la venue du camion, les familles ayant des origines italiennes se rendent dans un hangar situé dans l’énorme Limburghal, Eccoli qui! Elles sont là!
C’est alors qu’une autre idée m’est venue. Plus tard cette après-midi-là, je suis passé à la Bakkerij Goiris dans la Vennestraat. Le pâtissier avait eu l’idée de créer un assortiment de Genkse Koekjes (biscuits genkois) afin de refléter l’identité multiculturelle de la ville. Un ami turc lui avait confié une recette de biscuits Findikli aux noix, un chef à Naples lui avait révélé les étapes de la confection des biscuits secs Cantuccini et un ami grec lui avait prêté un ancien livre de cuisine contenant la recette de Kourabiéthes, des biscuits en forme de croissants de lune. L’assortiment contient également des Pierniki polonais sucrés et des Palets de Dames belges recouverts de chocolat.
© Stad Genk
À la fin de ces deux jours passés à Genk, et après être tombé amoureux de la ville, il était temps pour moi et mon assortiment de Genkse Koekjes de partir. J’en garderai le souvenir d’un endroit calme et convivial, peut-être grâce à tous les Italiens qui apportent à la ville une touche de dolce vita, mais aussi grâce aux Grecs, aux Turcs et à toutes les autres nationalités.
J’espérais entendre «Marina» être jouée quelque part à Genk avant de partir. Peut-être au Gepetto’s café, dans la Vennestraat, ou de l’autre côté de la rue à Gelateria Principe. Pourquoi pas même sur la terrasse du café Circolo Sardo Grazia Deledda où les mineurs qui venaient de Sardaigne avaient l’habitude se retrouver? Genk, tu devrais faire de «Marina» ton hymne!
Mais ce n’est pas grave, je l’écouterai dans mon casque lorsque je serai dans le train.
Mi sono innamorato di Genk. Alors que le train démarrait, j’ai eu envie de chanter mon amour pour Genk.
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